L’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution emploi le terme « tiers saisi » sans pourtant le définir. En règle générale, le tiers saisi représente le débiteur du débiteur c’est-à-dire la personne physique ou morale détenant des biens appartenant au débiteur principal.
Dans un arrêt du 11 janvier 2018, la Cour commune de justice et d’arbitrage, – CCJA -, a nuancé, ou mieux, explicité de manière claire et pratique qui est véritablement un tiers saisi.
Il ressort de l’arrêt n° 006/2018 que le tiers saisi est celui qui, au moment de la saisie, détient effectivement des fonds appartenant au débiteur. Ainsi, lorsque le solde de compte d’une société dans une banque est négatif à la date de la saisie, l’on ne peut considérer cette dernière comme tierce-saisie, et partant ne peut être condamnée au paiement des causes de la saisie.
Le contexte de l’arrêt n° 006/2018 du 11 janvier 2018
Dans ce pourvoi, l’United Bank for Africa, – UBA -, avait sollicité la cassation d’un arrêt rendu par la chambre civile et commerciale de la Cour d’appel d’Abidjan, qui l’avait condamnée au paiement des causes de la saisie.
En effet, deux sociétés sont en conflit : la société Axe Communication et la société Prestige Diamant. Cette dernière étant débitrice de la société Axe Communication, elle lui avait remis un chèque tiré sur son compte ouvert dans les livres de l’UBA. Ce chèque était revenu impayé. La société Axe Communication avait alors fait pratiquer une saisie conservatoire de créances entre les mains de l’UBA sur le compte de la société Prestige Diamant. À la signification de l’acte de saisie, l’UBA avait déclaré : « pas de compte sauf erreur ou omission de notre part ».
C’est cette réponse de l’UBA qui a amené la Cour d’appel d’Abidjan, dans son arrêt n° 146 à condamner la banque au paiement des causes de la saisie.
Pour cette Cour d’appel, « le tiers saisi est tenu à une déclaration exacte, complète et non tardive ; que le manquement à ces obligations entraîne suivant l’ article 38 et l’ article 156 de l’Acte Uniforme portant Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’Exécution, sa condamnation au paiement des causes de la saisie ou à des dommages intérêts, sans qu’il soit besoin de rechercher un quelconque préjudice souffert par le saisissant ».
L’UBA avait alors saisi la CCJA par un pourvoi en cassation. Elle a soutenu dans son argumentaire qu’il y avait erreur dans l’interprétation et dans l’application de ces articles de l’acte uniforme en cause dès lors qu’elle ne détenait aucune somme d’argent de la débitrice principale, la société Prestige Diamant.
Le fondement de l’arrêt n° 006/2018
La CCJA a relevé tout d’abord que le tiers saisi désigne la personne qui détient effectivement les sommes d’argent appartenant au débiteur au moment de la saisie.
Cependant, poursuit la CCJA, en condamnant l’UBA, alors que le compte du débiteur ouvert dans ses écritures était négatif, la Cour d’appel avait mal appliqué les textes légaux en la matière c’est-à-dire l’ article 38 et l’ article 156 de l’Acte Uniforme portant Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’Exécution. Et qu’en l’espèce, le compte de la société Prestige Diamant étant débiteur, l’UBA ne pouvait en être tiers saisi. La CCJA a cassé cette décision de la Cour d’appel et a évoqué.
Par ailleurs, la déclaration faite par l’UBA, in specie, est mensongère et inexacte car la débitrice principale avait bel et bien un compte dans ses livres mais qui était débiteur.
De l’analyse de cet arrêt de la CCJA, il y ressort qu’au sens de l’acte uniforme, l’UBA n’était pas un tiers car elle ne détenait pas des sommes d’argent de la débitrice principale. Il en résulte que les dispositions de l’ article 156 AUPSRVE ayant prévu que la déclaration mensongère et inexacte, faite par le tiers saisi, expose celui-ci à être déclaré débiteur des causes de la saisie, ne lui étaient pas applicables, et ce, même si l’inexactitude de sa déclaration aurait été établie [Voy. CCJA : arrêt 062/2014 du 25 avril 2014]
Consulter l’arrêt n° 006/2018 du 11 janvier 2018