La question est délicate dans la mesure où l’ article 15 du Traité Ohada limite l’examen d’un recours en cassation aux parties à l’instance ou à la juridiction nationale statuant en cassation.
Cependant, dans son arrêt n° 021 rendu le 08 février 2018, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, – CCJA–, fît droit à un pourvoi en cassation contre une ordonnance rendue en matière gracieuse par le Premier président d’une Cour d’appel qui ordonnait la suspension de l’exécution d’un jugement.
Le contexte de l’arrêt n° 021 du 08 février 2018
Une société a été admise en liquidation – la société Cotonnière Ivoirienne – LCCI –. Deux experts comptables – messieurs T. Koffi et A. Guillemain – ont été désignés syndics de cette liquidation.
Ces derniers avaient obtenus du Tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau la condamnation d’une autre société – la société Tropicale d’Engrais et Produits Chimique – STEPC – devenue société Louis Dreyfus Commodities Côte d’Ivoire – LDC-CI –, à reverser à LCCI des paiements perçus pendant la période suspecte avec exécution provisoire. La LDC-CI releva appel de cette décision. En attendant l’issue de son appel, elle saisissait, en matière gracieuse, le Premier président de la Cour d’appel d’Abidjan d’une requête aux fins de défense à exécution provisoire. Ce dernier fît droit à cette demande et pris une ordonnance suspendant l’exécution dudit jugement. C’est cette ordonnance qui a été soumise à la censure de la CCJA pour cassation.
La société LDC-CI souleva, in limine litis, l’exception d’irrecevabilité du pourvoi, tirée de la violation des dispositions des articles 14 et 15 du Traité Ohada qui énoncent le principe selon lesquelles sont seules habilitées à exercer un pourvoi en cassation, une partie à l’instance qui a donné lieu à la décision querellée ou une juridiction de cassation nationale. Selon elle, les syndics n’ayant pas été appelés à l’audience au cours de laquelle l’ordonnance de défense à exécution provisoire a été prise, ne pouvaient pas saisir la CCJA en cassation.
Le fondement de l’arrêt n° 021
Sur la base des dispositions de l’ article 15 du Traité, la CCJA a refusé de dénier aux syndics de la liquidation la qualité de la saisir car il a été établit qu’ils avaient un intérêt certain.
La Cour a fait observer que l’ordonnance du Premier président de la Cour d’appel, objet du pourvoi, a été prise dans le cadre d’un litige opposant les syndics de la liquidation à la société LDC-CI. Cette ordonnance visait à suspendre l’exécution provisoire d’un jugement entrepris devant la Cour d’appel d’Abidjan.
Par conséquent, puisque cette ordonnance préjudiciait aux intérêts de la liquidation, la CCJA a retenu que les syndics de la liquidation avaient un intérêt certain et la qualité à agir contre cette ordonnance. Elle avait donc rejeté cette fin de non-recevoir.
Est-ce à dire que l’intérêt prime sur la qualité pour la recevabilité d’un recours ?
Consulter l’arrêt n° 021/2018 du 08 février 2018