Dans son ordonnance ROR 017/RA1587 du 20 mai 2019, la chambre du conseil en référé-suspension du Conseil d’État a affirmé un principe fondamental : le juge administratif est incompétent pour ordonner la suspension d’une décision rendue en matière disciplinaire par le Conseil National de l’Ordre des avocats – CNO -. Ce type de décision relève de la fonction juridictionnelle et ne peut faire l’objet d’un référé-suspension.
Le contexte de l’ordonnance ROR 017
À l’origine de cette décision, une requête introduite par M. M.M.S., avocat radié du Barreau de Matadi par décision du Conseil de l’ordre en date du 15 septembre 2017. Cette décision avait été confirmée au second degré, le 28 juillet 2008, par le CNO siégeant en chambre disciplinaire. Contestant la régularité de cette procédure disciplinaire, M. M.M.S. a saisi le juge des référés du Conseil d’État d’une demande de suspension.
Il invoquait notamment la violation des droits de la défense, l’absence de saisine régulière du Conseil de l’ordre de Matadi, ainsi que l’irrégularité d’une sanction fondée sur des faits antérieurs à son inscription au tableau.
La motivation du Conseil d’État : une décision juridictionnelle, non administrative
S’appuyant sur l’ article 282 alinéa premier de la loi organique n° 16/027 du 15 octobre 2016 relative aux juridictions administratives, le Conseil d’État a rappelé que le référé-suspension ne peut porter que sur une décision administrative manifestement illégale.
Or, la décision querellée émanait du CNO siégeant en matière disciplinaire, à savoir dans l’exercice de sa fonction juridictionnelle. Elle ne constituait donc pas une décision administrative au sens du contrôle de légalité opéré par le juge administratif, mais bien un acte juridictionnel insusceptible de référé-suspension [lire les articles 97 alinéa 2 et 124 de l’ordonnance-loi organique du Barreau].
En conséquence, le Conseil d’État s’est déclaré matériellement incompétent pour connaître de cette demande.
Bon à savoir : Le CNO est à la fois un organe d’orientation, de direction et de contrôle administratifs des barreaux, une juridiction administrative ; une chambre de contentieux électoral, une juridiction arbitrale et une juridiction disciplinaire. In specie, en sa qualité de juridiction disciplinaire, le CNO siège en premier et dernier ressort dans les cas prévus aux articles 92, dernier alinéa et 97 de l’ordonnance-loi organique du Barreau. Usant de son pouvoir d’évocation, il peut également siéger en premier et dernier ressort dans le cas prévu à l’ article 120 de la même ordonnance-loi. Il siège en appel dans le cas prévu aux articles 96 et 109 .